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Mamans: comment retrouver un job?

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L’économie peine à recruter. Idéal pour les mères qualifiées qui veulent revenir sur le marché du travail? Erreur, c’est toujours la galère! Nos conseils et adresses.L’économie peine à recruter. Idéal pour les mères qualifiées qui veulent revenir sur le marché du travail? Erreur, c’est toujours la galère! Nos conseils et adresses.  

Le mois dernier, une étude du groupe Manpower établissait que 37% des entreprises suisses ne parvenaient pas à trouver le personnel dont elles avaient besoin. Les profils les plus recherchés? Les ouvriers qualifiés, les cadres, les secrétaires, les assistants personnels, les employés de bureau. Diagnostic confirmé il y a dix jours: les assureurs ont annoncé près de 1200 places vacantes dans leur secteur. Quand on est une mère désireuse de reprendre le travail – expression consacrée, même si s’occuper d’une famille n’a rien de vacances prolongées – c’est encourageant. Tout comme l’est la position du Département fédéral de l’économie, qui considère désormais les femmes qualifiées, à temps partiel ou ayant renoncé temporairement à travailler pour élever leurs enfants, comme un «potentiel de main-d’œuvre» trop longtemps ignoré. «Il y a eu une prise de conscience à la fois des autorités et des entreprises», constate Valérie Borioli Sandoz, du syndicat Travail Suisse (TS). D’autant plus que le débat sur la poursuite d’une forte immigration destinée à pallier le manque de main-d’œuvre locale va s’ampli fiant. Toutefois, la coauteure d’un récent rapport très remarqué de TS sur le retour à la vie active souligne que «les conditions ne sont pas encore réunies pour faciliter une reprise du travail». C’est le moins que l’on puisse dire car ce parcours requiert encore une sacrée motivation pour les quelque 12 500 mères qui, chaque année, se lanceraient dans cette course. Le conditionnel est de rigueur, car ces femmes sont ignorées des statistiques.

A quelle porte frapper?

Les difficultés recensées par TS commencent dès la ligne de départ. Comment fait-on, après trois, dix, voire vingt ans d’éloignement du marché du travail, pour y retrouver une place? Où faut-il s’adresser? A-t-on droit à des aides? Ces questions, les femmes, qu’elles aient choisi de retravailler ou qu’elles y soient contraintes (divorce, chômage ou décès de leur compagnon), se les posent.

«Le monde du retour à l’emploi est une véritable jungle que personne ne voit dans son ensemble», confirme Aline Robert, coresponsable du CAP (Conseil & Accompagnement professionnel) à Neuchâtel, une association qui vient en aide aux femmes dans cette situation. Voilà pourquoi TS plaide pour qu’une page internet d’information soit créée au niveau national. Car les dispositions légales qui encouragent le retour à l’emploi après une longue absence existent! Elles devraient notamment être mises en œuvre via les offices régionaux de placement (ORP) et les services d’orientation professionnelle.

«Concrètement, les mères qui veulent se réinsérer ne vont pas vers les ORP, parce qu’elles savent qu’elles n’y obtiendront rien, affirme Valérie Borioli Sandoz. Depuis la révision de la loi sur le chômage de 2011, les ORP doivent avant tout reclasser très vite les gens qui ont perdu leur emploi et reçoivent des indemnités. Ces femmes ne sont donc pas une «bonne clientèle». Une réinsertion après une longue interruption nécessite souvent, en effet, une nouvelle formation et du temps. Certains ORP se donnent toutefois la peine d’orienter au mieux celles qui s’adressent à eux. Faut-il alors miser sur les services d’orientation? Là encore, les particularités des mères en recherche d’emploi ne sont souvent pas assez prises en compte. «On y oublie souvent que ce public est différent des jeunes de 18 à 25 ans, le public habituel», relève Françoise Piron, directrice de Pacte, association fondée à Lausanne qui accompagne les femmes dans leurs parcours professionnels. Mais dans ce domaine aussi, des régions sont plus volontaristes que d’autres. Tout simplement parce que si les lois sont fédérales, ce sont les cantons qui les appliquent. Avec plus ou moins d’enthousiasme.

Pas assez de moyens

Les mères qui veulent reprendre une activité professionnelle s’adressent donc de plus en plus souvent à des associations ou, pour une minorité aisée, à des sociétés de coaching. Plusieurs associations se sont regroupées au sein du réseau national plusplus.ch où les femmes peuvent être conseillées tout au long de leur parcours. Qui commence par reprendre confiance en soi et en ses compétences et devrait, dans l’idéal, s’achever par des stages profession nels. A Fribourg, Espace Femmes, active depuis longtemps dans ce domaine, a proposé un tel projet au canton. «L’accueil a été positif, se félicite Giovanna Garghentini Python, directrice de l’association. Mais les fonds nécessaires seront-ils débloqués, alors que des coupes sont attendues dans le budget?» En effet, et bien que la qualité de leur travail soit reconnue, les ressources financières sont un problème lancinant pour les membres de plusplus.ch. «Ces difficultés obligent parfois certaines associations à recourir au bénévolat, s’insurge la syndicaliste Valérie Borioli Sandoz. Il n’y a que pour des femmes que cela se passe comme ça, franchement! Il faut absolument un financement sérieux.» Actuellement, 70% de leur – modeste – soutien vient du Bureau fédéral de l’égalité. Mais il n’est pour l’instant garanti que jusqu’en 2016. Et il limite à cinq le nombre d’entretiens accordés aux mères en reconversion.

Après la prise de conscience: à quand une nouvelle politique dans ce domaine? Lancé par TS, le débat a été relayé au Parlement, ce printemps, par des élus de tous les horizons politiques. Mais, pour l’instant, retravailler, c’est du boulot!

Pour en savoir plus:


Adresses:

Nos conseils

Vous voulez redémarrer?

  • Faites-le savoir largement autour de vous, bref, activez votre «réseau». Le terme a un petit côtécareer woman en tailleur griffé, mais tout le monde a un réseau, vous aussi: votre famille, vos ami(e)s, les parents d’élèves, l’as qui dompte vos cheveux (un salon de coiffure, c’est le lieu idéal pour diffuser une info), vos voisins… Important, car plus de 40% des emplois vacants ne paraissent jamais sous forme d’annonce!
  • Si vous n’avez plus de contacts réguliers avec votre milieu professionnel, ressortez votre agenda. D’anciens collègues peuvent être une mine d’infos sur l’évolution de votre ancien métier. Excellent pour décider s’il vaut mieux changer d’orientation!
  • Dans la mesure du possible (coût des cotisations), restez membre d’organisations professionnelles et/ou syndicales.
  • Internet peut donner un sacré coup de pouce. Inscrivez-vous sur les sites d’associations d’anciens élèves, suivez les réseaux de votre ancien milieu professionnel. Important: pour votre retour sur la scène de l’emploi, pensez à utiliser votre nom de jeune fille si c’est celui sous lequel vous avez étudié et travaillé. C’est ce nom-là qui fera peut-être «tilt» à ceux qui vous liront.

Témoignages


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«J’ai créé un festival!», Alison Cullen, 41 ans, mariée, 3 enfants de 9, 7 et 5 ans, Neuchâtel

Je suis pianiste, formée à l’Académie Chopin de Varsovie, mais j’ai mis ma carrière de côté pendant plus de huit ans. Ça n’a pas été un sacrifice, mais ce qui s’imposait, pour les enfants et moi, pendant une période de ma vie. Vous savez, on peut être féministe et mère au foyer! Depuis que j’ai senti un besoin vital de renouer professionnellement avec la musique, je construis mon retour au travail pas à pas. Mais qu’est-ce que c’est difficile! Il faut vraiment en avoir très envie ou alors y être contrainte pour des raisons financières. Bien sûr, j’ai dû me remettre à travailler dur, reprendre des cours, des contacts... Mais le plus compliqué, c’est d’arriver à se réinsérer quand on a des enfants: dans les structures d’accueil, la priorité va aux personnes qui ont des pourcentages fixes et ni mon mari ni moi n’avons de famille en Suisse.

La seule solution suffisamment flexible que nous ayons trouvée a été d’accueillir un jeune homme au pair. Il fallait aussi que je finance ce retour par des cours, de l’accompagnement au piano. Mais, là, j’ai eu besoin d’aide car je ne savais pas faire un CV, des offres… Finalement, je me suis rappelé un article de presse évoquant une association qui conseillait les femmes dans ma situation. C’est comme ça, un peu par hasard, que je suis arrivée chez CAP (Conseil & Accompagnement professionnel), où l’on m’a aidée à franchir cette étape. J’y suis aussi retournée pour des conseils juridiques, afin de monter une association pour un festival de musique de chambre. La première édition du Festival de Mai, à Colombier, a eu lieu cette année. Nous préparons la deuxième!

 

«L’Office du chômage a été formidable», Sara Staudenmann, 42 ans, 2 filles de 10 et 12 ans, Fribourg

Mon premier métier, c’était pâtissière-confiseuse. Avant la naissance de ma première fille, j’étais cheffe d’équipe dans une fabrique de chocolat. Même si j’adorais mon travail, la décision d’arrêter a été une évidence pour mon mari et pour moi. En plus, un temps partiel n’était pas possible et nous habitions loin de mon usine. Puis ma deuxième fille est arrivée… Pendant douze ans, mes enfants ont été ma priorité et je ne le regrette pas du tout, mais maintenant j’ai aussi envie de penser à moi et d’être indépendante financièrement de mon mari. Mon rêve est d’ouvrir une boutique de vêtements afros. Il y a un an, je suis donc allée à l’Office de l’orientation professionnelle. J’ai fait des tests et on m’a conseillé une formation d’aide-soignante ou un apprentissage de vendeuse. Mais je ne me vois pas me former avec des jeunes de 20 ans! Ça a été une déception…

Après quelques mois, j’ai cherché conseil à l’Office du chômage. Le monsieur qui m’a reçue a été formidable, il m’a adressée à Fribourg pour tous, un bureau de l’Etat où une superéquipe renseigne sur tous les domaines, travail, santé, famille… Le jour où j’y suis passée, il y avait justement un cours sur les CV, alors je l’ai suivi! Pauline, l’enseignante, venait d’Espace Femmes, une association qui accompagne des personnes comme moi. Ça a tout changé! Elle m’a conseillé de chercher d’abord un poste dans la vente avant de me lancer en indépendante, m’a aidée pour mon CV, les lettres de motivation… Depuis, je me sens supermotivée et j’ai confiance dans l’avenir!

 

«Les bons conseils au bon moment», Alexandra Chessex, 52 ans, séparée, 3 enfants, 27, 22 et 17 ans, Lausanne

Il y a onze ans, mon mari et moi nous sommes séparés. Cela faisait vingt ans que je n’avais pas travaillé. Entre mon diplôme de graphiste obtenu aux Beaux-Arts et la naissance de mon premier enfant, je n’avais eu qu’un seul emploi et il ne m’avait pas plu. J’étais donc devenue mère au foyer, sans aucun regret. Me remettre dans le circuit d’un jour à l’autre, ça été très dur. D’autant plus que mon métier s’était informatisé et que j’en étais restée au crayon! Heureusement, j’ai eu la chance d’avoir le soutien de gens qui m’ont donné les bons conseils au bon moment.

Ça a commencé avec la recherche d’un avocat pour mon divorce: une amie m’a dirigée vers l’aide sociale. Là, un conseiller que je n’oublierai jamais m’a assuré qu’on ne me laisserait pas tomber. Il m’a adressée au chômage; je n’aurais jamais pensé à y aller! J’avais droit à une petite indemnité, complétée par l’aide sociale et par un cours express dans mon domaine. J’ai aussi recontacté des anciens des Beaux-Arts qui m’ont encouragée à obtenir un brevet à l’Eracom. Si je passais le test d’entrée, c’était deux ans d’études et 9500 fr. d’écolage… Comment faire? Une amie m’a parlé de la Fondation lausannoise d’aide pour le travail. Là, on m’a proposé de payer ma formation, à condition que je rembourse la moitié des frais quand j’aurai réussi mes examens. C’était tellement génial que je n’y croyais pas! Diplôme en poche, j’ai fait des offres, répondu à des annonces: rien. Je désespérais, j’arrivais en fin de droit, lorsque j’ai décroché un remplacement. Il a été prolongé et, finalement, à 45 ans, j’ai été engagée définitivement.

Anne Kauffmann

 

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